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Le rythme sculptural de Gauguin – Oviri et ses sœurs

Dans de nombreuses analyses de l’art de Paul Gauguin, l’art égyptien est mentionné comme modèle formel, en particulier lorsqu’il s’agit de la sculpture Oviri (1894). Cette lecture, souvent inspirée des propres déclarations de Gauguin, maintient l’image de ses figures comme frontales, statiques et closes dans leur expression. Mais si l’on regarde de plus près Oviri ainsi qu’un certain nombre de ses peintures tahitiennes, une autre vérité se révèle : un mouvement doux, horizontal, qui constitue une tension rythmique dans le corps – en particulier dans ses figures féminines.


Une sœur d’Oviri

Un exemple frappant se trouve dans la peinture Mahana no Atua (« Un jour dédié aux dieux »), réalisée en 1894, la même année qu’Oviri. Au centre du tableau, une femme est assise, le dos droit et le torse tourné. Ses bras et sa tête suivent un mouvement spiralé, qui va à l’encontre de tout ce qu’implique la forme iconique classique et statique. Elle est à la fois immobile et en mouvement – corporellement et mentalement. Elle n’est pas seulement une image de la féminité exotique, mais une sœur d’Oviri – porteuse de la même force intérieure et de la même tension, de la même charge émotionnelle qui font du corps un lieu de sens et non pas seulement de représentation.

Un jour dédié aux dieux

Une rupture dans la représentation de la figure

Lorsque l’on suit ce rythme dans plusieurs œuvres de Gauguin – telles que Te Nave Nave Fenua, Two Nudes on a Tahitian Beach, Vahine no te vi et Adam et Ève –, on constate que c’est précisément ce mouvement ondulant qui est typique, et non l’exception. Ce sont plutôt les figures rigides et frontales qui paraissent déviantes dans l’œuvre de Gauguin. Cela suggère que la compréhension formelle de Gauguin n’est peut-être pas empruntée à l’Égypte, mais qu’elle s’est développée en dialogue avec les formes qu’il a rencontrées – ou imaginées – en Polynésie.

Te Nave Nave Fenua

L’esthétique du mouvement

Cela change la compréhension que l’on a de Gauguin. Non pas comme un artiste qui s’approprie des formes « primitives », mais comme quelqu’un qui tente de saisir une sensation rythmique de la vie. La figure dans Mahana no Atua le montre peut-être le plus clairement : elle n’est ni un symbole, ni un objet, ni une pose – mais un mouvement, saisi dans l’instant de l’image.

NB : J’ai contacté le Musée départemental Maurice-Denis, propriétaire d’Oviri, afin de connaître leur intérêt pour ces informations et d’éventuels commentaires, mais ils n’ont pas répondu.